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Comment tenir et appliquer ses bonnes résolutions ?

Pour ce premier article de 2023, je vais me prêter à un jeu : celui d’annoncer et motiver le choix des objectifs de ce blog pour la prochaine année. Pour pimenter cet exercice, j’inscris cet article dans l’évènement interbloggeur organisé par Olivier Roland, depuis son site devenir meilleur. Être imputable devant témoins est déjà en soi un excellent ingrédient pour appliquer de telles résolutions ! Voici le plan de cet article :

Un objectif n’est pas une fin, mais un moyen

Suite à nos bonnes résolutions de début d’année, nous avons tendance à établir des objectifs ambitieux, que nous espérons accomplir avant 12 mois. C’est un exercice stimulant de projection de résultats que nous voulons voir réalisé.

Il y a cependant quelque chose de paradoxale à se fixer des objectifs.

D’un côté, nous voulons être objectif en étant concret, quantitatif et limité dans le temps. De l’autre, un objectif est fondamentalement subjectif, car ce n’est pas pour les autres que nous prenons de telles résolutions, mais bien pour soi. Les personnes qui travaillent pour les objectifs des autres reçoivent un salaire en compensation.  Sans compensations, nous finirions tous démotivés. Même au niveau du langage, nous ne parlons pas de raison, mais de rationalisation, car nos objectifs n’ont en fait rien de rationnel. Avoir des objectifs n’est pas gage de réussite : les perdants aussi en ont eu (souvent les mêmes !).

Soyons donc honnête avec nous-même : en se fixant des objectifs, nous cherchons avant tout une compensation personnelle, une forme de gratification qui est par nature subjective. Alors pourquoi regarder un objectif comme une fin en soi ?

Un objectif n’est pas une fin, mais un moyen au service d’une stratégie long terme. C’est un moyen de faire travailler les autres pour soi ou se proposer des jalons sur le chemin que nous voulons parcourir.

Se donner un objectif, c’est vouloir rendre quelques choses d’imaginaire (subjectif), réel (objectif). Concrétiser un plan. Pourtant, nous savons par expérience qu’il ne suffit pas de vouloir quelque chose pour le rendre réel. L’ignorer revient à se mentir à soi-même. Ce serait mal se connaitre.

Pourquoi il est vain de vouloir contrôler ses objectifs

Un objectif sert à rester concentré sur une tache au détriment d’autres activités. Cet effort de concentration a pour effet de développer un domaine pointu de compétence. Jusque-là tout va bien.

Cependant, en se fixant des objectifs quantitatifs, mesurables, ce n’est pas la compétence que je cherche mais le résultat : la fin avant les moyens. C’est ce qu’on appelle plus couramment les solutions faciles : des raccourcis pour atteindre ses objectifs sans efforts, quitte à les abandonner le cas échéant. Pour éviter cet écueil, un bon objectif doit être qualitatif et non quantitatif.

Ce problème peut sembler à nouveau paradoxal, alors qu’il a été très simplement formulé par l’économiste Charles Goodhartlorsqu’une mesure devient un objectif, elle cesse d’être une bonne mesure.  C’est l’effet qui s’oppose à sa cause – une rétroaction – d’autant plus complexe qu’elle fait intervenir des interactions humaines. À partir du moment où quiconque a le moindre contrôle sur la mesure de ses objectifs, il finit par changer cette mesure ou en chercher une autre pour faire plier l’objectif en sa faveur.

Cette obsession du résultat est souvent un frein à la croissance long-terme, celle qui bénéficiera d’un effet composé dans le temps. On ne contrôle pas son résultat, on contrôle son activité. Si cette activité est intelligemment dirigée à produire, par exemple un produit ou contenu de qualité, alors les résultats finiront par arriver tôt ou tard, mais ce n’est pas à moi de décider quand. La seule chose que je contrôle est l’activité présente et la décision que je prends de me concentrer sur une tache plutôt qu’une autre.

Une résolution est un moyen à résoudre un problème

Si j’adresse mes ambitions en tant que problème et non plus en tant que mesure quantitative à atteindre, alors je me donne les moyens de résoudre ses problèmes au fur et à mesure qu’ils se présenteront. D’ordinaire, ce sont les problèmes qui rendent les objectifs caducs, alors que leur résolution est la clé d’une plus grande maitrise de soi et d’un accroissement de compétences.

Ne pas anticiper les problèmes ne les fera pas disparaitre. Le mieux le problème est défini, le plus concret il sera à résoudre. C’est définir une stratégie : anticiper, s’adapter, quitte à changer ses objectifs s’ils sont irréalistes ou vains. C’est finalement être responsable : chercher une réponse intelligente. Des problèmes, il y en aura toujours. Nous pouvons même aller plus loin : il n’y aurait pas d’intelligence sans problème à résoudre.

Faisons donc preuve d’intelligence en sachant s’adapter à un environnement changeant, ce qu’aucun objectif ne peut prévoir. Mais alors comment rester motivé lorsque nous sommes face à un problème insurmontable ?

Le moteur de l’action, c’est le désir

La raison comme la volonté ne suffit pas à nous faire changer. Le moteur du changement, c’est le désir ! Cette phrase de Frédéric Lenoir indique l’insuffisance de la volonté pour atteindre ses objectifs et pointe vers l’intégralité de la personne en tant que corps et esprit. Le désir est complexe, mélange de sentiments, d’aspirations et d’imitations. Un objectif est un désir de l’esprit, une envie est un désir du corps. ll est rare d’atteindre un objectif sans envie. Le désir est la quête d’un manque qui nous mettra forcément en mouvement.

Ne perdons pas notre temps à résoudre de faux problèmes, ceux qui n’ont pas de valeur à nos yeux. En fait, les objectifs non-tenus sont souvent une indication que nous devons préciser notre quête, un essai contraire à notre désir. Pour reprendre les mots de Charles Pépin dans les vertus de l’échec : nos échecs sont autant de tests pour notre désir. Il faut apprendre à se connaitre, car il est si facile de suivre les désirs des autres (leurs objectifs à eux) avant de comprendre les siens.

Si la volonté est ce qui assigne un objectif et l’intelligence ce qui résout les problèmes, le désir est ce qui engendre l’action. C’est une impulsion qui change la direction de ce que nous faisons autrement par habitude. L’ingénierie de ses habitudes, voilà une quête intelligente qui nous permettra de persévérer.

La mise en place d’une routine pour tenir dans la durée

Quelques soit nos résolutions, notre enthousiasme initial, notre intelligence même, il y aura tôt ou tard un rappel à la réalité, c’est-à-dire un décalage entre l’idée que je me fais du projet et sa réalisation.

Dans ces cas-là, on ne travaille plus à ses objectifs, on retombe dans les vieux schémas de nos automatismes. C’est à nous de créer un environnement et des routines, qui durant les moments d’abattement, nous permettrons de continuer à avancer (même lentement) vers la réalité que nous voulons construire. C’est faire preuve de persévérance.

Sur la construction de telles habitudes, je ne connais pas de meilleur auteur que James Clear. Citons-le en anglais plutôt que faire une mauvaise traduction. Son livre Atomic Habits a été traduit en français sous le titre Un rien peut tout changer.

You do not rise to the level of your goals. You fall to the level of your systems.

Your goal is your desired outcome. Your system is the collection of daily habits that will get you there.

This year, spend less time focusing on outcomes and more time focusing on the habits that precede the results

James Clear, Source: 3-2-1 Newsletter, January 2, 2020

Créer une nouvelle habitude, c’est comme se créer une nouvelle réalité. C’est changer les éléments déclencheur pour apporter une nouvelle réponse, qui non seulement changeront ce que j’obtiens, mais changerons qui je suis. Une boucle de rétroaction que j’aurais moi-même orchestrée.

En réalité, tant que l’habitude n’a pas changé jusqu’à mon identité, elle peut disparaitre à tout moment. Pour qu’une habitude prenne corps, il faut qu’il y ait identification. Ce n’est pas le temps qui crée l’habitude, c’est la fréquence (ou répétition). Il est important de choisir des habitudes en accord avec ses aspirations, non seulement pour mieux les tenir, mais aussi pour demeurer cohérent avec soi-même.

Le faire nous obtient un avoir qui transforme l’être en lui inspirant de nouvelles idées. En retour, l’être devient l’auteur d’un nouveau faire qui ouvre alors les portes d’un nouveau monde.

L’exemple de ce site d’auteur

Tout d’abord, il est important de préciser que ce site est une occupation personnelle en marge d’un emploi à temps plein et d’une famille nombreuse. Il doit grandir à mon rythme, régulièrement et sur le long terme. C’est stimulant d’avoir des objectifs ambitieux, mais je ne les vois pas comme une fin en soi. Nous perdons la plupart de nos défis par forfait, alors qu’il suffit bien souvent de continuer un peu plus chaque jour.

L’écriture est l’activité centrale de ce blog, à la fois en tant qu’expression joyeuse d’idées stimulantes et comme l’articulation d’une pensée cohérente.

L’écriture est devenue pour moi une nécessité, mais elle ne peut être partagée sous forme d’ébauche ou d’idée brouillonne. Elle doit être rigoureuse, précise et refléter l’état d’esprit d’une quête incessante de connaissance, à la recherche de moments d’eurêka!  Cet état d’esprit peut se décliner en quelques points concrets en ce qui concerne les activités de cette année 2023:

  • Maintenir une routine d’écriture d’au moins une heure par jour avant l’aube, avant la moindre activité familiale ou professionnelle.
  • Privilégier la qualité sur la quantité. Ne pas être tributaires des chiffres et du tout-quantitatif qui fini surtout par nous décourager.
  • Tenir un calendrier éditorial, avec une visibilité à trois mois. Ce n’est pas le sujet qui compte, mais la manière dont j’y apporte une réponse.
  • Lire trois fois plus que j’écris. Ecrire trois fois plus que je publie.
  • Prendre une semaine pour la rédaction de la lettre mensuelle et garder le rythme : Féconde.
  • Contacter au moins une fois par mois un bloggeur ou auteur sur des thèmes connexes afin d’élargir mes horizons
  • Revisiter cette liste tous les mois et l’ajuster intelligemment, en prenant note de ce qui fonctionne et ce qui ne fonctionne pas.

Ces résolutions peuvent paraitre presque anodines, mais souvenons-nous qu’elles sont avant tout subjectives. Les effets les plus improbables se manifesteront sur la durée, pourvu que je n’abandonne pas. Accélérer lorsque tout va bien, et maintenir la routine lorsque rien ne va plus. Prenons rendez-vous en décembre 2023 sur ce même blog !

Conclusion

Cet article est un essai, la réponse à un défi. Quelques idées saugrenues en contraste à la banalité de la question : comment tenir et appliquer ses bonnes résolutions ?  Le format est différent des autres articles de ce blog, plus incisif, mieux découpé. Les phrases plus courtes.

Si nous ne doutons pas que nos résolutions sont les bonnes, alors ne doutons pas que nous puissions les tenir.

Une graine plantée en terre germe de son propre chef, bien souvent malgré soi. Au début, les jeunes pousses se ressemblent toutes. Celles qui prendront de la force sont celles dont nous aurons amoureusement accompagné la croissance, jour après jour, apportant la chaleur, l’humidité ou l’ombrage nécessaire à son développement. Tenir une résolution, c’est prendre racine, avant de révéler après quelques années un feuillage luxuriant et des fruits savoureux.

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Féconde – la lettre qui fait germer les idées

Crédit : Pedro Ferreira sur Flickr

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